La Varende jugé par ses pairs

 

ROGER NIMIER


Je crois que La Varende a enchanté toute une génération. Il a des défauts, il est mélodramatique : il reste Pays d'Ouche, Man'd'Arc, ce climat mental qu'il a si bien ranimé. Les héros de roman, aujourd'hui, manquent de sang. La Varende les jette dans la vie et ces leçons de vaillance restent présentes à l'esprit.

Il a créé un univers romanesque. Man'd'Arc, Le Centaure de Dieu, Le Roi d'Ecosse et Nez-de-Cuir sont quatre explorations dans ces provinces que nous pensions endormies et dont il nous montre la fièvre.

Je ne sais si ses dernières oeuvres sont tout-à-fait comparables. Le roman ou les nouvelles, ordonnées autour d'un thème romanesque, me semblent ses terrains d'élection. Nous sommes un peu fatigués de l'histoire romanesque ; La Varende n'en est pas responsable, mais son Tourville ou son Mont-Saint-Michel en souffrent.

Je ne crois pas qu'il ait une influence très vive sur les jeunes romanciers d'aujourd'hui. En revanche, son nom veut dire immédiatement quelque chose : ces fins visages et ce sang tout prêt à sortir au grand jour... La fierté, le romanesque reviendront à la mode.

Paris, 27 avril 1950.